26.2.06

Kafka sur le rivage de Haruki Murakami

Au début, cela n’avait pas l’air d’un roman de Murakami. Quand on commence un roman de Murakami, on découvre assez vite qu’on a plongé dans un monde parallèle où quelque chose d’étrange risque à tout moment de survenir sans que pour autant le fil du quotidien soit rompu. J’ignore à quoi cela est dû. Peut-être à l’atmosphère qui, en se densifiant imperceptiblement, finit tôt ou tard par crever.
Mais dans Kafka dans le rivage rien de tel. Etait-ce la traduction ? S’agissait-il d’une mutation dans le style de Murakami ? J’étais un peu déconcerté.

Haruki Murakami

Mais peu à peu quelques signes caractéristiques sont apparus. Des dialogues en apparence banales qui laissent entendre une sorte d'écho lancinant. L'imbrication de récits multiples, l'enchâssement des vies, l'avènement d'un temps labyrinthique qui absorbe toutes les horloges, l'intrigue qui se déroule sous nos yeux comme une pelote et ce moment où "les choses commencent à se précipiter et tout converge vers le même lieu". La minutie envoûtante dans la description des lieux enfin, la bibliothèque Koruma en l’occurrence.

Kafka Tamura un adolescent muré dans son silence s’enfuit de chez lui le jour de ses quinze ans, afin d'échapper à la terrible prophétie que son père à prononcée contre lui. "Tu tueras ton père, tu violeras ta soeur et tu coucheras avec ta mère". De gare en gare, il arrive à Takamatsu et découvre la bibliothèque Koruma qui va devenir son foyer. Parallèlement, Nakata, un vieil homme simple d'esprit mais qui sait parler aux chats décide lui aussi de prendre la route, sans qu'à aucun moment leurs chemins se croisent. Deux destins, deux lignes qui débouchent sur une même réalité fantomatique et en toile de fond une musique lancinante.
Pour vous donner une petite idée de la suite, il est aussi question de Johnnie Walken, du colonel Sanders, d'une prostituée férue de Hegel et par moments il pleut des poissons. Tout ceci dans la plus stricte et obsédante normalité. Bref un roman de Haruki Murakami, malgré tout, à la fois fable philosophique et roman d'apprentissage. On le lit fébrilement, on s'en repaît, puis on le laisse lentement se méditer en nous.
« Il est interdit de fermer les yeux. Ça n’arrange rien, de toute façon, et n’efface pas ce qui est entrain de se passer. Au contraire même. Parce que quand tu rouvriras les yeux, les choses auront encore empiré. Voilà dans quel monde nous vivons, mon cher Nakata. » (Page 195)

A. Lamarca

1 commentaire:

Anonyme a dit…

merci pour intiresny Dieu